Quand travailler à son compte s’impose
Certains deviennent travailleurs autonomes par la force des choses, non pas parce qu’ils en rêvent. Ils doivent alors mener une réflexion sur leur statut professionnel.
Lorsque Carolina Castro a quitté son emploi en mars 2020, après 20 ans de métier, c’était sa décision. Mais elle n’avait plus l’impression d’avoir le choix. « C’était une question de santé mentale. C’était comme un cri à l’intérieur », relate la CRHA et stratège organisationnelle. « C’était très émotif. J’avais zéro filet. J’ai fait le saut de l’ange », se souvient-elle.
En tant que coach de gestionnaires, elle voit souvent ce genre de situation chez ses clients. « Les gens sont épuisés et veulent retrouver le contrôle. Ils se disent : “Tant qu’à travailler pour quelqu’un d’autre, je vais travailler pour moi-même” », explique-t-elle.
D’autres travailleurs qui sont devenus des contractuels n’ont pas eu le choix. Ceux qui ont perdu leur emploi, par exemple. « J’en vois de plus en plus. Le marché est en plein bouleversement. Parfois, c’est un “choix choisi”, et parfois, c’est un “choix subi” », résume-t-elle.
Dresser un bilan
Quelles que soient les raisons qui incitent des travailleurs à se lancer à leur compte, Carolina Castro leur conseille de commencer leur cheminement en dressant un bilan de ce qu’ils recherchent dans leur nouvelle carrière et des situations qu’ils préfèrent éviter. « Personnellement, je ne voulais pas travailler le genre d’heures de fou que je faisais avant. Si ça s’était produit, j’aurais su que je n’étais pas à ma place », dit Carolina Castro.
« J’ai fait beaucoup de gestion de carrières, et les gens qui ont pris le temps de faire un exercice d’autoanalyse de leurs intérêts professionnels et de leurs valeurs trouvent habituellement ce qu’ils cherchent. Ce sont les autres qui trouvent ça difficile », avance Ghislaine Labelle, CRHA, Distinction Fellow et psychologue organisationnelle.
Attention, insiste-t-elle, travailler à son compte ne convient pas à tout le monde! Ceux pour qui la sécurité financière et le travail d’équipe sont prioritaires, par exemple, décideront peut-être de retourner dans une organisation.
Trouver du soutien
Pour faire face aux nombreux défis qui les attendent, les nouveaux entrepreneurs auraient tout intérêt à se joindre à un groupe professionnel, comme ceux qui existent dans les réseaux sociaux, suggère Ghislaine Labelle. En plus de briser l’isolement et d’être une excellente source d’entraide, ces groupes peuvent aussi prêter main-forte aux travailleurs autonomes qui veulent se constituer une clientèle. « Il faut être visible et ne pas avoir peur de cogner aux portes, notamment en contactant les membres de notre réseau sur LinkedIn, par exemple. Si l'on n’a jamais développé cet outil, il serait bon de s’y mettre », poursuit Ghislaine Labelle.
Des débuts difficiles ne veulent pas dire qu’on a pris la mauvaise décision, souligne Carolina Castro. « Il y a ce que j’appelle des poussées de croissance. Ça fait mal, mais ça ne veut pas dire qu’on n’est pas à la bonne place », dit la coach. Elle-même roulait à pleine vapeur – sans jamais avoir fait de publicité – à peine huit mois après s’être lancée à son compte!
Reconfiguration du marché du travail
Le marché du travail a été extrêmement difficile l’an dernier, en particulier pour les employés du secteur privé et pour les contractuels. Pas moins de 30 300 travailleurs autonomes ont perdu leur emploi en 2020, alors que, dans le secteur public, aucune variation significative n’a été enregistrée, d’après l’Institut de la statistique du Québec.
Ghislaine Labelle croit cependant que les travailleurs autonomes réussiront bientôt à tirer leur épingle du jeu. « Avant la pandémie, on remarquait déjà d’importantes pénuries de personnel. Ce qui veut dire que les employeurs vont faire appel à des consultants et à des contractuels pour pourvoir aux postes vacants lorsque l’économie va reprendre », prédit la psychologue organisationnelle.
« On a tous eu le choc. C’est le marché du travail qui est en train de se redéfinir. On saute dans le train, parce qu’on y voit des possibilités, ou on reste à la gare et on regarde le train passer », conclut-elle.
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